mardi 30 mars 2010

La nuit de samedi...


La nuit était froide. Paris s'était parée de ses douces lumières nocturnes. Le silence nous caressait le visage, alors que nous traversions les rues désertes elle et moi. J'étais à son bras ou elle était au mien, je ne me souviens plus; nous nous souvenions les trois années passées. J'ai pensé à un cycle, à un tour de manège, à la révolution d'un planète autour de son étoile. Boucler une saison pour se retrouver presque au même endroit, mais pas au même moment.

La nuit était bien entamée. Tant de choses dans une journée trop courte, des retours en arrière et des propulsions en avant, des interrogations à la fois vieille et nouvelles. Nous parlions de lui et d'eux. De lui que je détesterai toujours pour toujours posséder quelque chose d'elle; trois années que je voulais le déposséder de cette possession, je n'ai toujours pas trouvé comment faire. Dans mes mots hésitants et mes idées floues, je comprenais pourquoi cela se passait ainsi, je venais de le voir à l'oeuvre sous mes yeux. Mais je savais qu'elle avait plus précieux ailleurs que vers lui. D'eux nous parlions, ceux du présent et du futur. Nous avions passé les trois dernières années à comprendre qu'on méritait les vrais hommes en vraies femmes que nous étions. Les discours se passent toujours des hommes et les silences se passent toujours des femmes, c'est dans nos mots que nous dessinions l'implicite qu'exprime leurs mains.

La nuit était belle. Elle s'offrait à mon boitier photographique, et je capturais des longues plages de temps en instantanés cadrés, pendant que je lui parlais et qu'elle me parlait. Elle avait froid et moi aussi. Mais elle avait réservé le Louvre trois ans plus tôt, et la Lune nous gratifiait de sa présence. J'y étais déjà venue mais ce fût la première fois que je capturais pourquoi il fallait des pyramides en verre dans la nuit parisienne. Les réverbères alignés comme des soldats montaient la garde de notre sanctuaire d'une nuit et éclairaient la scène. Des poses de huit secondes pour une ouverture focale de vingt-neuf et une sensibilité de cent, c'était la recette de l'empaquetage de l'atmosphère dans ma collection de scènes au temps gelé. Le monde entier que nous avions partagé pendant trois ans, nous lui avons poliment prié de nous attendre derrière le grillage, et nous nous en foutions.

La nuit était légère, les heures filaient. J'avais mal aux pieds d'avoir déambulé dans tout Paris,mais heureuse de ma fatigue et de sa douceur. Elle appelait un taxi qui nous mit un morceau de jazz, pendant que dans les brumes qui précède le sommeil je voyais défiler la ville de ma tendre amie.



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